Avis d’experts Finance – In fine tout est tourné vers un seul objectif : sauvegarder la trésorerie

Dans un contexte de crise sanitaire sans précédent, Adequancy a souhaité interroger ses communautés de managers de transition pour comprendre et partager les recommandations des dirigeants experts en transition afin de contribuer à la pérennisation des activités des entreprises et faciliter la reprise d’activité post covid-19.

Entretien avec Philippe Bloch, DG Finance.

Quelques mots sur vous, vos expériences qui feraient écho à la situation

Je suis directeur financier de transition plutôt spécialisé en retournement, restructuring et situations financières complexes. J’interviens régulièrement dans des participations de fonds d’investissement. La crise actuelle ressemble à bien des égards au contexte que l’on rencontre habituellement en situation de restructuring mais sa gestion nécessite beaucoup plus d’agilité et de réactivité.

Dans le retournement, une fois que l’on a obtenu le financement d’un plan, il faut le délivrer en suivant un chemin qui est connu et partagé.

A l’heure actuelle, on n’a aucune visibilité sur l’avenir, on ne connait pas l’échéance de la reprise : c’est ce qui rend la gestion plus compliquée, et c’est pour cela qui faut avancer très rapidement sur tous les sujets en même temps.

 

Contexte : que vous évoque la situation actuelle ?

La grosse différence avec tout ce que nous avons pu connaitre ces dernières années, c’est le caractère généralisé de la crise : tout le monde est touché. Dans ce contexte, l’Etat met en place des dispositifs d’accompagnement qui n’existent habituellement pas dans le cadre traditionnel du retournement (qui repose essentiellement sur l’actionnaire qui mobilise des sources de financement classiques ou restructure la dette en fonction de la situation).

Il faut donc être opportuniste et agile pour saisir tous les dispositifs couverts par l’Etat et les financeurs classiques (Factor, Assureurs-Crédit, Lease-backs, …) qui permettront de passer la crise.

 

Quels sont les facteurs clés de succès pour la reprise ? les points de vigilance ?

La vitesse d’exécution va être clé à tous les niveaux et notamment l’obtention des aides publiques et la protection de la trésorerie. On sait que les ressources de l’Etat ne vont pas être infinies et ce sont ceux qui réagiront le plus rapidement sur les demandes et les dossiers qui seront les plus à même de préparer la reprise.

Quand l’Etat annonce par exemple un plan de 10 à 12 milliards pour soutenir l’assurance-crédit (dispositifs CAP & CAP +), il est certain que des arbitrages seront faits par les assureurs-crédits. Il faut donc aller très vite pour voir quels sont les clients éligibles et faire traiter rapidement les dossiers. C’est vraiment la différence avec le retournement classique : il faut être beaucoup plus dans l’anticipation.

L’idée est que lorsque la reprise arrive, l’on soit dans les meilleures dispositions possibles pour la saisir, et surtout éviter de la rater.

Côté fonds d’investissement, avec lesquels je dialogue très régulièrement en ce moment, ils sont dans une démarche de mise en réseau de leurs participations (grâce à des newsletters par exemple) pour partager les éléments d’analyse et les bonnes pratiques. C’est une approche très collaborative et transverse. In fine tout est tourné vers un seul objectif : sauvegarder la trésorerie.

 

Selon vous, quel plan d’action type est à mettre en place pour adresser les enjeux ?

Il faut actionner les leviers suivants :

  • Actionner tous les dispositifs gouvernementaux (PGE, chômage partiel, report d’échéances sociales et fiscales, soutien aux assureurs-crédits,…) qui permettent de tenir la trésorerie jusqu’à la reprise, pour ne pas être trop fragilisé au moment du redémarrage effectif.
  • Dimensionner pour optimiser en permanence les coûts aux stricts besoins de l’activité à un instant donné : la reprise sera progressive, il faut donc piloter les ressources engagées en fonction du cadencement de la reprise. Concrètement cela ne sert à rien de redémarrer à plein tout de suite. D’où l’utilité d’accompagnement sur le chômage partiel dans la durée. Il faut bien évaluer le carnet de commandes à un instant donné et produire le juste nécessaire, pas plus.
  • Sécuriser les niveaux de stocks et sa relation avec ses fournisseurs stratégiques : il est fort probable qu’il y ait à un moment un court effet d’aubaine avec une forte demande de rattrapage qui va surement être assez courte il faut donc un stock suffisant pour répondre à l’à-coup de demande. Mais comme cela consomme de la trésorerie, il faut trouver un juste équilibre et rester vigilant sur ses en-cours fournisseurs à régler sans retards.
  • Sécuriser le risque client : le risque de défaillance est désormais très important, et l’assurance-crédit ne va pas tout couvrir. Il faut donc être vigilant à faire des affaires « saines » et ne pas hésiter à revoir sa politique de crédit client. On ne peut pas se mettre en risque en travaillant avec des acteurs qui pourraient entrainer la société dans leur chute.
  • Ne pas négliger le développement du CA : il faut continuer de mobiliser les forces commerciales, le marketing et les services clients pendant la période de confinement pour alimenter le portefeuille de commandes au moment de la reprise. Il faut être proactif.

 

Si vous ne deviez donner qu’un seul conseil aux entreprises qui nous lisent, quel serait-il ?

Développez votre sens de l’anticipation et votre agilité. C’est le seul moyen de minimiser l’impact de cette crise. Certes, d’une certaine manière le sens de l’anticipation est le propre de la fonction de dirigeant mais c’est encore plus crucial qu’en temps normal. Pouvoir dessiner une trajectoire post-crise en adéquation avec le secteur, l’environnement économique et la concurrence devrait permettre d’ouvrir des opportunités. Il faut notamment rester très observateur et à l’écoute du marché car il certain que tout le monde ne s’en sortira pas.

 

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